Après la campagne de 1303 en Flandres, les Flamands avaient enlevé Middelbourg et une grande partie des îles de Zélande au comte de Hainaut, pris et brûlé Térouenne, et mis le siège devant Tournai qui ne dut son salut qu'à la trêve que s'empressa de signer Philippe le Bel avec les rebelles de Boniface en septembre 1303. A la nouvelle de la mort de ce dernier, le roi de France décida qu'il fallait agir de nouveau contre la Flandre. Il réorganisa en conséquence son armée durant la période le la trêve et se trouva prêt à agir à l'expiration de celle-ci.

         Il avait pris à sa solde 16 galères qui firent le tour de l'Espagne pour venir assaillir la Flandre maritime. Au début du mois d'août 1307, le roi vint établir son camp près de Tournai : on y comptait 12.000 hommes d'armes, un des plus grands corps de chevalerie qu'eut jamais levé un roi de France dans une guerre non religieuse, et 60.000 fantassins des communes et des campagnes, peu expérimentés aux armes. L'infanterie flamande, au contraire, était bien organisée. 60.000 flamands s'étaient massés devant Lille, sous le commandement de Philippe de Flandre, un des fils du comte Gui.

         Avant l'arrivée de Philippe le Bel à Tournai, un corps de 15.000 flamands, dirigé par Gui de Namur, avait repris les hostilités en Zélande et assiégeait par terre et par mer Zierikzée, où s'était renfermé le comte de Hainaut. Les galères génoises du roi, jointes aux escadres normandes et poitevines, battirent la flotte flamande, prirent Gui de Namur, et firent lever de siège de Zierikzée. Philippe, encouragé par ce premier succès, et impatient de laver la tache imprimée à sa renommée par la retraite de 1302, marcha droit à l'armée rebelle, campée près de Mons-en-Pucile, dans la châtellerie de Lille. Les Flamands préparèrent leur résistance et s'entourèrent d'un double rang de chariots et de palissades, " afin que nul ne les pût transpercer ni envahir sans grand péril ". Du côté français, on avait retenu la leçon de Courtrai et la stratégie adoptée fut de harceler sans répit la place de tous côtés sans vraiment vouloir y pénétrer, de manière à faire lever un vent de panique chez les insurgés. Les fantassins gascons et languedociens ne cessèrent de voltiger autour des retranchements en y faisant pleuvoir une grêle de pierres et de flèches : ils tenaient les Flamands en alerte sous un ardent soleil d'automne, " sans les laisser manger ni boire ".

         Parallèlement à ces escarmouches, le roi avait entamé des négociations pour la reddition de la ville: " beaucoup de français, dit la Chronique de Saint-Denis, croyant pour les messagers qu'ils avaient vu aller d'un camp à l'autre que la paix fut toute faite et réformée, se désarmèrent et s'étendirent çà et là ; car ils croyaient qu'il n'y aurait point de bataille ce jour là ". Bien mal leur en prit ! Sur la fin de la journée, les Flamands décidèrent d'une sortie et se précipitèrent hors de leurs tentes en fondant sur l'armée du roi.

         Cette attaque fut menée de front sur trois colonnes, ayant chacune son objectif :

- la première, dirigée par Guillaume de Juliers, marcha droit sur le pavillon royal

- les deux autres, avec Philippe de Riéti et son frère Jean de Namur à leur tête, culbutèrent les escadrons des Comtes de Valois et de Saint-Pol ainsi que plusieurs compagnies de gendarmerie.

         La bonne coordination de ces attaques fit que la tente du roi fut forcée : Philippe le Bel vit alors massacrer à quelques pas de lui un chevalier et 2 bourgeois de Paris attachés à son service : il eût infailliblement été pris ou tué, si les flamands l'eussent reconnu à quelque signe distinctif ; mais, comme il ne portait ni sa cotte fleurdelisée, ni son heaume à couronne d'or, il put s'échapper à la faveur du tumulte, tandis que les Flamands, s'estimant déjà vainqueurs, mettaient sa tente au pillage.

         Le roi courut alors chercher des armes et une monture pour rallier ses hommes pris de panique : " Quand le roi fut à cheval, il montra très fier et très hardi semblant à ses ennemis. Les français, qui, déjà pris de peur, se voulaient disperser et enfuir, voyant le roi faire si noble convenance, et les flamands tirer tous vers lui, se hâtèrent vitement de revenir à l'aide, en criant tous ensemble : le roi se combat ! le roi se combat !.

         La bataille dès lors reprit de plus belle, chaque camp faisant preuve de ténacité et d'un courage admirable dans la mêlée. Malgré cela, nos hommes firent tant de morts du côté Flamand que ceux-ci ne purent résister davantage et ployèrent sous le nombre et se débandèrent, abandonnant charrettes, chariots et tout appareil de guerre. Et ainsi, la bataille parfaite et finie, le roi Philippe, à torches de cires allumées, s'en revint aux tentes avec sa noble chevalerie.

         La victoire avait été chèrement achetée : plus de 1.500 hommes d'armes étaient restés sur le champ de bataille ; les Flamands avaient perdu Guillaume de Juliers, avec environ 6.000 hommes, le gros de leur armée s'était retiré en désordre dans la direction d'Ypres, tandis que Philippe de Riéti se jetait dans Lille avec quelques milliers d'hommes d'élite.


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